Les familles de Pyrame et Thisbé, bien que voisines, sont déchirées depuis des années par des conflits d’intérêts. Ennemis de toujours, ils ont tout fait pour que leur progéniture ne se croise jamais, et dans le cas contraire, pour entretenir le feu de la haine.
Mais Pyrame et Thisbée, leurs enfants, guidés par l’innocence de leurs cœurs, et contre toute attente, tombent éperdument amoureux l’un de l’autre. De cet amour pur qui jaillit à l’adolescence et ne peut s’accorder aux interdits des adultes. Au sein de leurs foyers, le scandale éclate quant à leur relation.
Leurs parents ne la considèrent pas du point de vue de leurs émotions ni de leurs ressentis. Il s’agit juste d’entretenir la hargne qui habite en leur demeure, et ne peut accepter de baisser la garde sous le prétexte de l’amour, quitte à condamner les deux jeunes gens. Ici, l‘ego et la fierté n’ont rien à faire de ce genre de valeurs.
Thisbé ne veut en aucun cas renoncer à Pyrame. Ils passent leurs journées blottis chacun du côté de leur mur, à se parler entre une fissure. De déclaration en déclaration, ils décident de s’enfuir loin de ce royaume maudit. Rendez-vous est pris pour la nuit suivante en un lieu bien connu de tous, la tombe de Nirus, l’époux de Sémiramis, au pied d’un mûrier qui donne des fruits blancs. Thisbé arrive la première et attend patiemment son amoureux. Attirée par la chair humaine, une lionne féroce qui passait par là s’approche d’elle, la gueule déjà pleine de sang d’avoir dévoré un animal des champs. Effrayé la jeune fille part se réfugier dans une grotte proche de là. Mais dans la précipitation, elle perd son voile, que la bête s’empresse de déchiqueter, l’emplissant du sang de sa victime précédente.
Lorsque Pyrame arrive enfin, il découvre le fin tissu maculé de rouge. Imaginant le pire, désespéré, il décide d’en finir. Il retourne son poignard contre lui et la plonge dans son cœur, s’affaissant contre l’arbre qu’il répand de son sang. N’entendant plus le lion, Thisbé sort enfin de sa cachette, et se précipite vers le mûrier où elle découvre la silhouette exsangue de son aimé. Ne pouvant le ramener à la vie, elle s’empare à son tour de la lame, et se transperce elle aussi le cœur, son cadavre recouvrant celui de son cher Pyrame. Une ultime union, dans un bain de sang qui jaillit comme une fontaine, imprégnant les racines de l’arbre.
Depuis ce jour tragique, les mûres ont changé de couleur, empruntant celle du rouge profond s’écoulant des veines des amants partis de s’être trop aimé. L’ironie du sort voulu que les familles furent si affectées qu’elles joignirent les cendres de leurs enfants chéris dans la même urne pour les jeter dans deux fleuves, qui portent désormais leur nom. L’histoire de Pyrame et Thisbé issue des Métamorphoses d’Ovide, a inspiré de nombreuses œuvres, picturales, sculpturales, poétiques et littéraires. Parmi eux figure le récit de Roméo et Juliette et de leurs familles ennemies, transposé à Venise.
Un amour passionnel et dramatique pour ceux qui l’ont vécu, mais qui parvient à réconcilier des êtres que tout opposait, ramenant la paix dans les cœurs.